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Samira Ibrahim Photograph: Str/EPA |
Dimanche 11 mars dernier avait lieu l’audience finale du procès du médecin égyptien accusé d’avoir effectué des « tests de virginité » sur plusieurs femmes lors de la manifestation du 9 mars 2011. Le tribunal militaire devait se prononcer sur le cas de ce médecin militaire qui comparaissait pour « outrage aux bonnes mœurs » et « désobéissance aux ordres militaires ».
Le 9 mars 2011, après une violente manifestation place Tahrir, 18 femmes ont été placées en détention sous la garde de l’armée, subissant alors les coups des soldats, de violentes décharges électriques ainsi que des fouilles au corps. Parmi elles, Samira Ibrahim, jeune femme de 25 ans, a été contrainte de subir un « test de virginité », « examen » de cinq minutes au cours duquel le médecin militaire s’est, dit-elle, livré à une pénétration digitale avant de lui confirmer qu’elle était toujours une «jeune fille». Certains responsables militaires justifient ces tests par la nécessité selon eux, d’empêcher des manifestantes qui seraient vierges de porter plainte pour viol contre des soldats les ayant arrêtées. La pratique des tests de virginité a été dénoncée comme une forme de « torture » et de violence sexuelle par Amnesty International et Human Rights Watch.
Les manifestantes avaient finalement été condamnées par un tribunal militaire à des peines d’un an de prison avec sursis pour des infractions totalement factices. Samira Ibrahim avait alors eu le courage de déposer deux plaintes, l’une pour demander l’interdiction de cet « examen » et l’autre accusant le médecin militaire d’agression sexuelle, révélant au grand jour deux tabous que sont l’armée et le sexe.
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Le médecin Ahmed Adel devant la presse suite a sa relaxe dimanche 11 mars 2012 source: REUTERS/Mohamed Abd El-Ghany |
Le verdict
Si la Cour administrative du Caire, saisie par Samira Ibrahim, avait ordonné le 27 décembre 2011 à l’armée de ne plus procéder a ces tests, les tribunaux militaires ne semblent malheureusement pas vouloir accorder réparation aux femmes ayant subi cette technique invasive. En effet, le tribunal a prononcé la relaxe du médecin, jugeant les témoignages trop « contradictoires ». La réaction de Samira Ibrahim ne s’est pas fait attendre, qualifiant le verdict de « farce » et regrettant que l’affaire ait relevé de la compétence des tribunaux militaires. Heba Morayef, la représentante en Egypte de Human Rights Watch a en effet dénoncé le manque d’indépendance de la justice militaire, affirmant que ce jugement allait « faire reculer les espoirs de voir l’armée tenue de rendre des comptes ».
Suite à la démission du président Hosni Moubarak le 11 février 2011, mettant fin à 29 ans de règne autoritaire, c’est le Conseil Suprême des forces armées (CFSA) qui est désormais a la tête du pays. Si ce dernier s’est excusé suite aux nombreux signalements de violences commises par l’armée et les forces de sécurité contre des femmes, rien n’a véritablement été mis en place pour traduire les responsables présumés en justice, ou pour accorder réparation aux victimes. Amnesty International dénonce ainsi ces agressions et accuse le CFSA de laisser faire dans un seul et unique dessein : celui d’humilier et marginaliser les femmes et jeunes filles manifestantes, afin de les dissuader de participer à la vie publique.
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